Denis Mukwege remporte le 13e prix de la Paix de Séoul

Le célèbre gynécologue congolais, surnommé réparateur des femmes, Denis Mukwege, a été désigné lauréat du Prix de la paix de Séoul, qui lui sera remis le 6 octobre prochain.

dr-mukwege-bukavuLe Dr Denis Mukwege s’est vu décerner ce prix « pour ses efforts dans l’aide fournie à quelque 48 500 femmes et enfants victimes de violences sexuelles durant la guerre civile en République démocratique du Congo (RDC) », ont indiqué les organisateurs du Prix que cite le journal ‘‘The Korea Times’’. « Il a contribué à l’amélioration des droits humains pour les femmes et les enfants en traitant les victimes de la guerre non-éthique dans laquelle le viol est utilisé comme arme de guerre », a précisé vendredi 2 septembre la Fondation culturelle du Prix de la paix de Séoul.

Ce prix, décerné pour la 13ème fois, lui sera remis le 6 octobre à Séoul. Le Dr Mukwege recevra une plaque et la somme de 200 000 dollars.

Nombreux prix

Le Dr Mukwege, 61 ans, a fondé voici plus de quinze ans, lors de la guerre civile, l’hôpital de Panzi à Bukavu, le chef-lieu de la province du Sud-Kivu (est de la République démocratique du Congo), en proie à des violences persistantes entretenues par la présence de groupes armés congolais et étrangers. Avec son équipe, ce gynécologue devenu célèbre soigne les victimes de violences sexuelles présentant de graves blessures.

Ce gynécologue a déjà reçu de nombreux prix, dont le prix Roi Baudouin pour le Développement en 2011 en Belgique et, en octobre 2014, le Parlement européen lui a décerné le prix Sakharov pour la liberté de l’esprit pour son combat pour la protection des femmes. Le mois dernier, le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a fait de lui le premier lauréat du Prix pour la démocratie et les droits de l’Homme.

POUR L’ALTERNANCE DÉMOCRATIQUE

À noter qu’en juillet, le Dr Mukwege manifestait aux côtés d’activistes pour la tenue d’élections dans le respect des délais prévus par la Constitution en République démocratique du Congo (RDC). Le gynécologue, célèbre pour rendre leur dignité aux femmes victimes du viol comme arme de guerre à l’est du pays, s’est prononcé pour l’alternance démocratique.

D’après la Constitution, le président Joseph Kabila doit normalement laisser la place à son successeur avant la fin de l’année 2016. Mais au vu de l’organisation du scrutin, il y a fort à parier que les élections seront repoussées. Pour l’instant, ni les listes électorales ni les cartes d’électeurs ne sont prêtes. La Cour constitutionnelle a d’ailleurs fait savoir, le 11 mai dernier, que le président Kabila pourrait se maintenir au pouvoir jusqu’à l’élection de son successeur.

NE VOULOIR RIEN ENTENDRE D’UNE TRANSITION

L’opposition et les organisations internationales s’inquiètent de voir se réaliser un scénario du « glissement », à savoir une phase transitoire qui s’étendrait sur plusieurs années. Certains souhaiteraient voir Denis Mukwege assurer la transition entre la fin de mandat de Joseph Kabila et l’entrée en fonction de son successeur, le temps de mettre en place des élections en bonne et due forme. Mais le principal intéressé s’oppose à cette idée : « Commencer à ouvrir les brèches de la transition, c’est en fait favoriser tout simplement le désordre. Aujourd’hui, il y a lieu de prévenir ce désordre simplement en organisant les élections », a-t-il déclaré au journal Le Monde.

Alors qu’il s’évertue à répéter qu’il n’a pas l’intention de faire de la politique, il s’est vu nommé « ambassadeur des citoyens » par le groupe de jeunes activistes Filimbi. Le chirurgien affirme être honoré d’avoir été désigné comme porte-voix mais assure que « c’est une responsabilité lourde qui ne peut pas être portée par une seule personne […]. « Nous portons tous cette responsabilité, il faut absolument que ces jeunes se sentent soutenus », a-t-il poursuivi.

UN DIALOGUE NATIONAL CONTESTÉ

En vue d’apaiser les esprits, le président Kabila a convoqué un dialogue politique national autour de la question des élections. Une initiative qui ne fait pas l’unanimité. Les grands partis de l’opposition ont récusé le facilitateur de ce dialogue, Edem Kodjo, estimant qu’il est trop proche de la majorité présidentielle. Et d’aucuns voient dans ce projet de dialogue un stratagème pour permettre au président Kabila de se maintenir au pouvoir. C’est ce que pense Denis Mukwege. De quoi comprendre ses déclarations faites fin janvier : « En Occident, lorsque l’on dialogue, cela dure quinze jours et les décisions sont respectées. Ici, les palabres peuvent durer dix ans, sans résultat… Et ce n’est que lorsque le président arrive en fin de mandat que tout à coup il est question de dialogue avec la classe politique. »

UNE VOLONTÉ D’« ÉVEILLER LES CONSCIENCES »

Le médecin continue de susciter l’enthousiasme chez ses compatriotes : « Ce qu’il fait est exceptionnel et l’homme l’est tout autant. C’est un modèle d’intégrité et de probité […] C’est le nouveau Mandela », n’hésite pas à affirmer Hervé Kiteba, porte-parole du Collectif des élus français originaires du Congo-Kinshasa (CEFOCK). Mais le Dr Mukwege affirme avoir pour unique vocation d’« éveiller les consciences ». « Si la population congolaise peut prendre conscience de tout le potentiel que nous avons en RDC […], elle pourra tout simplement réaliser qu’il n’est pas acceptable que les Congolais vivent dans la situation qu’ils connaissent aujourd’hui. La priorité, c’est amener la population à comprendre qu’elle doit réclamer ses droits et que, si elle ne les défend pas, il n’y a personne qui va les lui donner en cadeau. »


Le Potentiel Online

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